La semaine dernière, nous étions conviés par TDF (anciennement TéléDiffusion de France) à une présentation de la diffusion de vidéos en Ultra HD via la technologie TNT.
D’un point de vue subjectif, le gain est impressionnant, on distinguait le grain de peaux des joueuses de Roland Garros, il était possible de « voir » le visage d’une personne dans le public, la netteté est surprenante. La comparaison avec un flux HD classique est par contre compliquée : d’une part les téléviseurs Full HD ne sont généralement pas capables de recevoir le flux HEVC et d’autre part le flux 4K et le flux 1080p de France Télévision n’utilisaient pas les mêmes caméras.
Actuellement, il y a deux canaux de test : le premier diffuse une démonstration en boucle, le second diffusait la semaine dernière les matchs de Roland Garros en direct. Côté technique, le canal DVB-T2 — une technologie déjà utilisée dans d’autres pays, évolution du DVB-T de la TNT — permet environ 40 mégabits/s sur les 8 MHz du canal de test, et TDF a alloué 22,5 mégabits/s à Roland Garros et 17,5 mégabits/s à la démonstration. Dans les deux cas, on travaille en 3 840 x 2 160 (l’équivalent de quatre images Full HD) à 50 images/s, bien évidemment en progressif. Le codec utilisé est le HEVC (H.265), avec l’encodeur d’Envivio, une société française.
Alain Komly, de chez TDF, a répondu à nos questions, et nous avons eu quelques précisions sur les tests. Premièrement, les flux sont ouverts : nous avons pu les capter avec un tuner DVB-T2 USB, et les démonstrations étaient effectuées sur des téléviseurs Ultra HD du commerce, un modèle Samsung, un modèle Panasonic et un modèle Sony. Les trois appareils sont capables de recevoir les deux chaînes de tests, parfois après quelques réglages pour activer le tuner DVB-T2, et le HEVC est décodé. On peut simplement noter un retard significatif du modèle Panasonic (7 à 8 secondes de décalage) par rapport aux autres.
Le passage final ?
La question qu’on se pose évidemment est simple : ça arrive quand ? La réponse est compliquée et dépend de plusieurs choses. La première, c’est le fait qu’une partie de la bande de fréquence utilisée pour la TNT risque de passer chez les opérateurs de téléphonie. Une des raisons du test de TDF est justement de montrer que la TNT peut encore évoluer et que les fréquences sont nécessaires. La seconde, ce sont les téléviseurs : il faut un tuner DVB-T2 et un décodeur HEVC pour recevoir les chaînes. Pour le premier point, ce n’est pas réellement un problème : beaucoup de téléviseurs intègrent un tuner de ce type depuis 2011 (et parfois avant), mais il est rarement activé en France. La raison est simple, certains pays (comme le Royaume-Uni) utilisent le DVB-T2 pour diffuser les chaînes en haute définition et les téléviseurs sont produits au niveau européen. Pour le HEVC, c’est plus compliqué : seuls quelques rares modèles récents sont compatibles. Visiblement, on devrait se retrouver dans la même situation qu’avec le passage au H.264 : une obligation légale, au fur et à mesure du temps, d’intégrer les composants nécessaires, en commençant par les modèles de grande taille (et onéreux). Avant de passer au HEVC, il faudra sûrement arrêter la diffusion en MPEG2 (utilisée pour les chaînes SD en France), d’ici 2015 ou 2016, le parc actuel étant dans la très grande majorité des cas capable de décoder le H.264. Enfin, le dernier frein vient évidemment des chaînes de télévision, qui sont passées au Full HD assez récemment en interne et qui ne veulent évidemment pas changer tout le matériel. Globalement, une diffusion en Ultra HD en 2019 ou 2020 n’est donc pas irréaliste.
Et la concurrence ?
À noter que d’autres technologies étaient utilisées pour Roland Garros : un flux satellite par Orange et un flux IP, avec l’aide de BBright. La diffusion en Ultra HD sur de l’ADSL semble irréaliste actuellement, étant donné que les experts espèrent dans le meilleur des cas descendre à 15 mégabits/s pour un flux HEVC Ultra HD et que le débit moyen descendant en France est de l’ordre de 6 mégabits/s. Il est bien évidemment possible d’utiliser le très haut débit (fibre optique notamment), mais ça reste assez confidentiel en France, ce qui explique l’absence d’expérimentations publiques.