Pourquoi la GeForce RTX 3090 Ti a-t-elle disparu de la communication de NVIDIA depuis sa présentation au début de l’année ? Voici quelques éléments de réponse…
Présentée brièvement par NVIDIA au début du mois de janvier à l’occasion du CES, la GeForce RTX 3090 Ti manque toujours à l’appel. Le constructeur nous avait pourtant annoncé que l’on aurait plus de détails à son sujet dans les semaines suivantes, et certaines rumeurs optimistes parlaient même d’une commercialisation à la fin du mois de janvier.
Force est de constater que quelque chose est venu contrecarrer les plans de NVIDIA, le constructeur ayant entre temps demandé à ses partenaires de « mettre en pause » la production de GeForce RTX 3090 Ti. Début février, la production de la carte était toujours à l’arrêt, sans explication publique. Si les délais et retards sont monnaie courante dans l’industrie informatique, quelque chose d’inhabituel s’est visiblement produit après l’annonce de la RTX 3090 Ti au début de l’année.
RTX 3090 Ti : consommation et connecteur d’alimentation
Nos confrère de chez Igor’s Lab ont pu récupérer un certain nombre d’informations au sujet de cette GeForce RTX 3090 Ti auprès de quelques partenaires de NVIDIA. Il semblerait que cette carte graphique ait principalement été destinée à servir d’essai pour les différents fabricants, en plus de se présenter comme le nouveau produit haut de gamme au catalogue de NVIDIA, pour préparer l’arrivée des prochaines puces Lovelace du constructeur. Ils leur est ainsi possible de se “faire la main” sur cette GeForce RTX et de régler les problèmes de consommation (actuels et à venir sur la prochaine génération de puces). Le TDP de la carte, 450 watts, est au passage confirmé mais avec une consommation maximale (Max Power Limit) 15% au dessus environ, soit juste en dessous de la limite de 520 watts.
C’est ici que le connecteur d’alimentation 12VHPWR destiné à remplacer les actuels connecteurs PCIe 6-pins et 8-pins et supporter une puissance bien supérieure prend tout son sens. Le connecteur à 12 broches présent sur les GeForce RTX 3000 Series Founders Edition est curieusement identique au connecteur 12VHPWR, à l’exception des quatre broches optionnelles (S1 à S4). Ce connecteur est donc “rétrocompatible” avec la norme 12VHPWR, mais cela ne s’applique qu’au connecteur physique. C’est d’ailleurs pour cela que NVIDIA utilise un PCB légèrement modifié (PG136C) sur la GeForce RTX 3090 Ti, avec cette fois-ci un “vrai” connecteur 12VHPWR.
Des alimentations compatibles PCIe 5.0 mais pas trop
Pendant ce temps, certains fabricants de blocs d’alimentation ont commencé à présenter des blocs “PCIe 5.0 Ready” plus ou moins compatibles avec les nouveaux connecteurs 12VHPWR. Si certaines alimentations à venir possèdent réellement un ou deux connecteurs 12+4 broches, telles que les MEG et MPG chez MSI ou la ROG Loki d’Asus, d’autres ne sont équipées que d’un connecteur 12 broches, sans les 4 broches supplémentaires, limitant alors puissance à 450 watts “seulement” au lieu de 600 watts. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Asus a “rétrogradé” la compatibilité de son connecteur PCIe Gen 5.0 à seulement 450 watts alors qu’il était initialement indiqué sur la page du produit une puissance maximale de 600 watts sur ce connecteur.
NVIDIA de son côté utilise son connecteur à 12 pins depuis des mois déjà, bien avant que le PCI-SIG (l’organisme en charge de la norme PCI-Express) ne finalise (quasiment) le connecteur 12VHPWR. Si les 12 broches principales sont identiques entre le connecteur 12VHPWR et celui des Founders Edition, avec six broches +12V et six masses associées, les quatre connecteurs supplémentaires servent à la communication. Sur les quatre, trois sont déjà temporairement affectés à des fonctionnalités (S1, S2 et S3). Le dernier (S4) est quant à lui réservé à un usage futur. Plus particulièrement, S3 correspond à la fonction SENSE0 chargée de détecter les limites de puissances initiales et maximales autorisées pour le connecteur, le câble et l’alimentation. Sans ces quatre broches, et donc si SENSE0 n’est pas connecté, la limite de puissance est automatiquement définie sur 450 watts pour le câble 12 broches.
Revenons un instant sur le terme “temporairement” utilisé plus haut. La nouvelle norme ne semble en effet pas encore totalement finalisée, et dans le pire des cas une redéfinition complète de l’attribution et du codage des broches pourrait avoir lieu. C’est bien entendu hautement improbable, mais un équipement câblé en suivant l’état actuel de la norme pourrait alors rencontrer des problèmes si celle-ci venait à être modifiée par la suite.
L’alimentation : toute une une question d’équilibre
Une autre raison du retard concernant la RTX 3090 Ti semble provenir de l’équilibrage de l’étage d’alimentation. Les 520 watts en pic ne peuvent pas être fournis de manière fiable à la carte graphique avec un seul connecteur d’alimentation à 12 broches (450W max), et on doit forcément faire appel en supplément au connecteur PEG de la carte mère. Or l’alimentation des différents composants d’une telle carte graphique est un équilibre fragile : sur la photo ci-dessous, les parties en vert (MSVDD) et bleu (NVVDD) correspondent à l’alimentation du GPU d’une GeForce RTX, celles en rouge (FBVDDQ) sont pour alimenter la mémoire.
L’alimentation côté connecteur PEG ayant depuis longtemps déjà atteint sa limite de 5,5 ampères sur le rail +12V, comme défini par la norme PCI-Express, la seule solution pour éviter de dépasser ce plafond avec une carte encore plus gourmande que la RTX 3090 est obligatoirement de revoir les étages d’alimentation de la carte pour en réorienter une partie vers le connecteur 12 broches. A en croire les partenaires de NVIDIA, cette étape d’adaptation du design est d’ores et déjà réalisée. La question se pose également du côté des convertisseurs de tension et des condensateurs POSCAP/MLCC placés sous le GPU. On a vu par le passé que certaines des premières RTX 3080 souffraient de problème de stabilité causés par ces composants, inadaptés à la consommation de la carte graphique. Si 350 ou 450 watts causent des problèmes de stabilité (réglés de manière logicielle via les pilotes graphiques), que se peut-il se passer avec des pics de consommation de 520 watts ?
Enfin, les puces de mémoire graphique à 21 Gbps représente aussi un défi pour les partenaires de NVIDIA, l’objectif étant de valider un design permettant d’obtenir un signal le plus stable et intègre possible. Pour eux, la GeForce RTX 3090 Ti permet de se faire la main en attendant la prochaine génération de GPU Lovelace de NVIDIA.