Introduction
Quand les SSD étaient encore hors de prix (plus de 10 € par gigaoctet), ils offraient non seulement des performances excellentes mais aussi une consommation bien inférieure à celle des disques durs. On prit alors l’habitude de penser “SSD = meilleure autonomie”. Le temps passant, le prix du gigaoctet de SSD a fondu (il se situe aujourd’hui aux environs de 1 €) et la capacité moyenne a augmenté. Or plus de capacité signifie plus de puces mémoire à alimenter, donc plus d’énergie consommée. Les plus gros SSD sont-ils toujours aussi intéressants pour les PC portables ? Au contraire, cette technologie commence-t-elle à mordre sur l’autonomie ?
SSD : plus de capacité, plus de watts
Depuis l’aube des disques durs, la capacité augmente grâce à une amélioration constante et rapide de la densité des plateaux magnétiques. Le nombre de ces plateaux ne varie pas : les constructeurs peuvent en empiler un maximum de 5 dans les disques de 3,5 pouces et un maximum de 3 dans ceux de 2,5 pouces. Par conséquent, il n’y a pas besoin de plus d’énergie pour faire tourner un disque dur de 1 To aujourd’hui qu’un disque dur de 20 Go il y a 10 ans.
Les SSD se comportent de manière opposée : augmenter la capacité implique de multiplier le nombre de puces de mémoire Flash et donc la consommation. Cette augmentation peut passer inaperçue car les fabricants savent empiler plusieurs dies de mémoire Flash dans un seul package : le nombre de packages présents sur le PCB des SSD semblent alors constant. Mais la réalité est bien qu’un SSD de 256 Go possède deux fois de puces qu’un SSD de 128 Go. Toutes les puces étant utilisées en parallèle, un gros SSD consommera obligatoirement plus qu’un petit.
Ces considérations théoriques ont un impact mesurable sur la consommation des SSD. Nous reproduisons ici les mesures que nous avions réalisées lors du test de la gamme Crucial M4.
Notre wattmètre est formel : alors que le modèle de 64 Go consomme seulement 2,2 W en lecture séquentielle et 2,6 W en écriture séquentielle, son grand frère de 256 Go réclame 2,5 W et surtout 4,6 W dans les mêmes conditions. Le modèle de 512 Go est encore plus gourmand, et dépasse en écriture la limite de 5 W imposée par notre système de mesure. Dans les mêmes tests un disque dur classique de 500 Go demande seulement aux environs de 3 W.
Il est donc faux de croire que les SSD consomment systématiquement moins que les disques durs. Leur consommation devient-elle pour autant problématique ? Pour le savoir, nous avons comparé l’autonomie d’un Dell XPS 14z dans différents usages muni de son disque dur d’origine (Western Digital Scorpio Black 750 Go), d’un SSD Crucial M4 de 128 Go ou d’un SSD Crucial M4 de 512 Go.
Lecture vidéo 1080p
Le premier de nos tests réplique un usage classique d’un PC portable : regarder une vidéo. Nous lançons une lecture en boucle du court métrage open source Big Buck Bunny (1080p, H.264, 9,7 Mbit/s) sous VLC. Dans ce test, les connexions réseaux sont coupées, la luminosité de l’écran est réglée à 97 cd/m2.
Disque dur, SSD 128 Go et SSD 512 Go finissent dans un mouchoir de poche, l’écart entre les deux extrêmes étant de 14 minutes ou 5,5 %. On remarque néanmoins que ce test qui ne lance quasiment que des opérations de lecture séquentielle met en évidence la hiérarchie suivante : le SSD de 128 Go finit premier, suivi du SSD de 512 Go puis du disque dur.
Usage intensif
Pour notre second test, nous avons simulé un usage intensif en lançant une boucle du test standard de PC Mark Vantage, WiFi allumé (mais non connecté), l’écran toujours à 97 cd/m2.
L’autonomie absolue est évidemment bien inférieure et l’écart entre les trois configurations se resserre : il est au maximum de 2,5 %, ce que nous ne considérons pas significatif. Ce tassement du classement est logique : par rapport à la consommation du processeur (de l’ordre de 30 W), celle du disque dur (mois de 5 W) est très faible. Lorsque le CPU est fortement sollicité, la différence de consommation entre le disque dur et les SSD n’est donc plus un facteur déterminant l’autonomie.
Navigation internet
Notre troisième test est basé uniquement sur la navigation Internet : 6 onglets sont rechargés toutes les 30s (cache désactivé), la connexion étant réalisée en Ethernet, WiFi désactivé.
Là encore, les écarts sont faibles (4,8 % au maximum), mais on retrouve la hiérarchie établie dans le premier test : le 128 Go finit le premier, suivi du 512 Go puis du disque dur.
Conclusion : RAS, pour le moment
Que peut-on conclure de nos essais ? D’une part, que la meilleure autonomie est obtenue avec un SSD de faible capacité. D’autre part que le SSD de 512 Go parvient à délivrer une autonomie supérieure à celle du disque dur, alors même que sa consommation maximale est plus élevée. Enfin, et surtout, que les écarts que nous avons mesuré sont très faibles, suffisamment pour être négligeables par la majorité des utilisateurs, car les autres composants, à commencer par l’écran, masquent les différences qui existent dans la partie stockage.
Ce dernier constat n’est cependant pas universel. Nous avons choisi pour nos tests un PC portable de milieu de gamme, équipé d’un écran assez large (14″) et d’un processeur puissant. Si nous avions utilisé un netbook, dont l’écran est plus petit et le processeur bien moins consommateur d’énergie, l’importance relative de la consommation du disque dur/SSD aurait été supérieure. Toutefois, qui envisagerait de mettre un SSD de 512 Go (commercialisé aux alentours de 800 €) dans un netbook coûtant au minimum deux fois moins cher ?
On peut également arguer que certains usages mettront bien plus en évidence les différences de consommation. Si l’on est amené à écrire de très gros volumes de données à partir d’une source externe rapide, alors on pourra constater une baisse de l’autonomie due à la forte consommation en écriture du SSD de 512 Go. En dehors de ce cas très spécifique, l’influence d’un SSD est au pire négligeable, au mieux bénéfique. Nous mettrons ce verdict à jour quand des SSD de 1 To pour PC portables seront disponibles.