Spotify et Deezer seront taxés en 2024, vers une hausse du prix des abonnements ?

Le ministère de la Culture prévoit une taxe sur les plateforme de streaming musical en 2024, afin de contribuer au financement du CNM (Centre national de la musique). Reste à savoir si elle ne sera pas juste reportée sur les clients par les plateformes en question…

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© Spotify

Le gouvernement envisage de taxer les plateforme d’écoute de musique en ligne, type Deezer et Spotify, depuis plusieurs mois. Emmanuel Macron avait suggéré cette contribution en juin dernier, à l’occasion de la Fête de la musique ; c’était du moins la menace brandie par le président de la République au cas où la filière ne trouvait pas des moyens de financement alternatifs pour favoriser la création ; menace qui sera mise à exécution en 2024.

Pour le moment, les modalités de cet impôt sur les plates-formes d’écoute de musique en ligne n’ont pas été définies. Seule indication : la contribution sera « basée sur un très faible taux de prélèvement sur le chiffre d’affaires des plateformes » selon les propos du ministère de la Culture rapportés par l’AFP (Agence France Presse).

À ce stade, cette taxe reste donc une volonté affichée plutôt qu’une réalité concrète. Elle a toutefois fait l’objet d’un vote au Sénat le mois dernier dans le cadre de l’examen du projet de budget 2024 ; désormais, le ministère argue que « le projet de loi de finances pour 2024 confirmera la création d’une contribution des plateformes de streaming ».

Une taxe pour financer le CNM

Si la mise en œuvre de cette taxe n’est pas fixée, sa finalité l’est en revanche : elle doit, en principe, servir au financement du CNM (Centre national de la musique). Créé en 2020, cet établissement public a remplacé le CNV (Centre national de la chanson, des variétés et du Jazz) ; c’est un peu le pendant du CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée) pour le secteur musical.

Sans surprise, les concernés sont opposés à cette taxe. Ils militaient en faveur dune contribution volontaire. De fait, mercredi, Apple, Deezer, Meta, Spotify, YouTube et TikTok ont publié un communiqué exposant un accord qui promettait une enveloppe d’au moins 14 millions d’euros en 2025. Il est d’ailleurs assez amusant de voir Apple main dans la main avec Spotify au vu de leurs relations passées.

Ce montant est assez proche des 15 millions estimés pour une taxe de 1,75 % évoquée dans le rapport du sénateur Julien Bargeton rendu en avril dernier, et duquel est née l’idée d’un tel impôt.

Pour contextualiser ce montant, le CNM estime à 80 millions d’euros son budget annuel pour mener à bien ses missions et assurer ses frais de fonctionnement. L’essentiel provient des taxes sur la billetterie des spectacles vivants (environ 30 millions d’euros cette année) et de l’État (26 millions). Le troisième axe de financement incombe aux OGC (organismes de gestion collective), mais dans une mesure marginale (environ 1,5 million d’euros contre 7 prévus initialement).

Autant dire qu’une entrée d’environ 15 millions via la taxe portant sur les revenus du streaming musical payant et celui gratuit financé par la publicité représenterait une part non négligeable du budget du CNM.

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© Deezer

Qui payera à la fin ?

Malika Séguineau, directrice générale de Prodiss, le syndicat des producteurs et diffuseurs de musique, a ainsi déclaré à l’AFP : « Nous nous réjouissons que le gouvernement ait pris cette décision, soutenue par les députés et les sénateurs. C’est le seul dispositif qui permet de doter le CNM d’un financement pérenne et équilibré ».

Son de cloche logiquement inverse chez Spotify : « Nous prenons acte de la décision du gouvernement, qui ne tient pas compte des efforts consentis de la part de nombreuses plateformes dont Spotify. C’est un véritable coup dur porté à l’innovation, et aux perspectives de croissance de la musique en ligne en France. Nous évaluons les suites à donner à la mise en place de cette mesure inéquitable, injuste et disproportionnée ».

Enfin, comme toujours avec de nouvelles taxes, il n’est pas inenvisageable que les sociétés les répercutent sur les consommateurs en augmentant le prix des abonnements ou le nombre de publicités. Précisons aussi que la rentabilité de Spotify et de Deezer est précaire, et qu’une taxation mettrait donc bien plus en péril leurs finances que celles des GAFAM.

Sources : Le Monde, Les Échos, Le Figaro