Pour jouer dans un silence total ?
Intro et présentation du boîtier
Le Monsterlabo First est un boitier à refroidissement passif à la surface de dissipation conséquente et dont les finitions soignées devraient séduire une clientèle exigeante prête à y mettre le prix. Pour les fans de refroidissement passif, c’est un peu un rêve devenu réalité. Imaginez alors notre plaisir de tester non pas un exemplaire, mais deux d’un coup ! En effet, nous avons reçu un boitier vide pour nos propres expérimentations (avec le nouveau Ryzen, sans en dévoiler plus) et un autre prémonté, qui nous permettra de tester l’efficacité du boitier dans différentes configurations.
Ce boitier prémonté est celui que les visiteurs du monde entier avaient pu découvrir au Computex ; il avait reçu un écho très positif dans de nombreuses rédactions. Nous avons donc passé le week-end à tester le boitier, aussi bien pour ce qui est du montage que des températures. Nous sommes également en contact avec le constructeur avec lequel nous avons discuté certains détails. Voici donc, en exclusivité, le compte-rendu de nos premières expérimentations.
Pour ce modèle hors normes, nous avons revu notre protocole de test. Désormais, ce sont pas moins de trois caméras infrarouges haute définition qui scrutent en simultané sous différents angles l’échauffement des composants. Quant à l’étui de protection dans lequel nous avons reçu le Monsterlabo First, nous supposons qu’il n’est pas définitif et pourrait encore évoluer. Du moins on l’espère.
L’étui une fois ôté, on se retrouve face à une masse d’aluminium blanche ou noire qui ne laisse rien deviner des nombreux accessoires fournis. Il faut en effet se munir d’un tournevis et ôter une partie des plaques pour enfin découvrir le cœur de l’engin. L’expérience de déballage ne mise donc assurément pas sur le côté pratique, mais attise la curiosité et la convoitise de l’acquéreur en multipliant les petites « épreuves » avant de se révéler complètement. Les plus pressés seront sûrement en rage, les connaisseurs sauront apprécier.
Accessoires
Une fois le boitier ouvert, on découvre un nombre important d’accessoires : un câble riser VGA, des vis de toutes sortes, diverses fixations pour le GPU et le CPU, des adaptateurs, des joints et des capuchons de vis sont inclus. Un ventilateur de 140 mm Noctua, la marque de référence pour les passionnés de PC silencieux est aussi fourni, et de la pâte thermique du même fabricant. « Trahison ! » s’écrieront les puristes du refroidissement passif. À notre avis, c’est un choix judicieux pour épargner les composants si la température venait à grimper à un niveau préoccupant. Après tout, il est toujours possible d’avoir un pc parfaitement silencieux 95 % du temps, avec l’assurance que les composants fonctionneront à pleine puissance, même dans une charge longue et particulièrement intense.
Nous verrons aussi que le refroidissement de la carte graphique apporte son lot de challenges dans un refroidissement complètement passif, mais nous y reviendrons.
Prise en main et caractéristiques
Ce boitier de 19 L ne peut embarquer qu’un système au format mini-ITX, mais pèse tout de même près de 7 kg, la majeure partie de son poids provenant de son radiateur massif. Construit comme un tank, il résistera sans aucun problème à maints démontages et remontages. Et en théorie, il sera aussi beaucoup moins souvent nécessaire de l’ouvrir pour nettoyer les ventilateurs… Quant à savoir si oui ou non il faut brancher le ventilateur Noctua… disons simplement que placé dans le boitier, il est parfaitement inaudible de l’extérieur.
Les blocs de refroidissement GPU et CPU sont impressionnants, et les six caloducs les reliant aux 21 lamelles du radiateur ne manquent pas d’attirer l’attention. Le lecteur pragmatique se demande sûrement comment il est censé courber ses derniers pour l’adapter au format de sa carte graphique ou carte mère. La réponse est simple : c’est à la carte de se déplacer et pas l’inverse. D’où les nombreuses vis et fixations en tout genre. Il sera en tout cas difficile de mener à bien son projet sans quelque compromis comme par exemple un léger pliage des composants « pour que ça passe. »
Ces compromis acceptés, on obtient un boitier unique en son genre, non seulement de par son prix et son poids, mais aussi sa performance de refroidissement. La galerie suivante montre sous toutes les coutures le boitier prémonté. Comme on le voit, malgré sa construction très massive, il faut pas mal de contorsions pour que les composants se placent là où il faut. Un boitier pour les amateurs de courbes, les férus de symétrie passeront leur chemin. Et non, ce n’est pas le montage qui est en faute, c’est vraiment le boitier qui de par sa construction rigide, oblige les composants et le monteur à s’adapter.
Mais après tout, avec un prix de 450 euros au détail, il faut bien en avoir pour son argent, et le challenge que constitue le montage ne fait qu’augmenter la satisfaction finale de l’acquéreur. Il faut aussi dire que chaque exemplaire et fabriqué à la main en Europe, Monster Labo étant un constructeur belge. Vous savez donc quoi boire une fois votre système en place.
Le boitier peut héberger une carte mère, une carte graphique, un boitier d’alimentation SFX et des disques durs ou autres SSD. N’oublions pas non plus les câbles reliant la carte mère au monde extérieur, les connecteurs de la carte mère n’étant pas directement accessibles.
Configuration et méthode de test
Configuration ambitieuse
Le boitier prémonté renferme une carte mère ASRock Z390, un Core i5-9600K d’Intel et une GeForce RTX 2060 de Nvidia. Oui, vous avez bien lu, une RTX 2060, qui consomme environ 160 W à elle seule. On se souvient de la tentative de Powercolor de dissiper 130 W qui s’était soldée par un échec cuisant… Mais laissons à Monster Labo le bénéfice du toute, peut-être que leur élan d’enthousiasme lors du choix des composants n’est pas seulement là pour épater la galerie.
Nous arrivons donc lentement aux mesures. Précisons tout de suite que selon les programmes de monitoring comme Hardware info, Aida64 ou GPU-Z, le boitier parvient haut à main à refroidir les composants. Nos trois caméras infrarouges racontent cependant une autre histoire, et c’est pourquoi nous sommes en contact étroit avec le constructeur pour trouver une solution aux problèmes de surchauffe que nous allons décrire plus loin.
Système de test : trois caméras infrarouges
Le trio de caméra se compose d’une Optris PI 640 et de deux Xi 400, du même constructeur berlinois. La PI 640 possède trois objectifs, mais pour ce test, nous avons utilisé l’objectif standard pour observer la carte graphique. Une autre caméra grand angle observe le bloc de refroidissement CPU, tandis que la troisième à objectif macro scrute les convertisseurs de tension de la carte mère. Chaque caméra est gérée de manière indépendante et combinées, elles offrent une image détaillée du processus d’échauffement. On peut même faire des vidéos très fluides puisque la fréquence de rafraichissement monte à 30 FPS.
Les points de mesure ont été au préalable recouverts d’une couche de laque thermique, transparente ou non, ou bien d’un bout de bande de mesure thermique. Les petits radiateurs que nous ajouterons dans la deuxième partie des mesures sont fixés avec de la colle thermique, plus facile à ôter que les bandes collantes traditionnelles. Il suffit d’appliquer autour du point de colle un peu d’isopropanol, et après quelques minutes, le tout se décolle presque tout seul.
Mesures de températures
Les nouvelles caméra Optris Xi400 ont l’avantage de faire la mise au point de manière automatique, ce qui n’est pas le cas de la vénérable Pi640. Pour garantir la précision des mesures, nous appliquons aussi de laque noire sur les lamelles du radiateur. Une fois les caméras calibrées, on obtient cette première image sur un système au repos depuis environ une demi-heure. La température ambiante était de 22°C.
Refroidissement du CPU
Le refroidissement du CPU seul ne pose aucun problème au Monsterlabo First. En test de torture avec Prime 95 et instructions AVX activées, la température ne dépasse pas les 67°C après 30 minutes. La consommation du CPU s’élève selon les sondes à 105 W et la température des convertisseurs de tension monte à 84°C. Le ventilateur est alors à l’arrêt. Activé, la température des VRM chute à 80°C.
Le CPU n’est donc pas vraiment limité par son refroidissement, mais plutôt par la capacité de la carte mère à refroidir les VRM dans un espace confiné. Il faudra donc veiller à l’efficacité et au refroidissement des VRM de la carte mère. Une surchauffe aura en effet vite fait d’entrainer des arrêts inopinés du système, voire pire.
De bons résultats, en théorie
Précisons tout de suite que le Monsterlabo First ne limite pas vraiment la performance de la carte graphique. Le refroidissement du GPU est adéquat. Mais les convertisseurs de tension dégagent aussi de la chaleur, environ 25 W sur cette carte. A cela s’ajoutent les modules mémoire, qui consomment environ 2 W par module. Toutes ces consommations marginales finissent par s’additionner et font sérieusement chauffer le PCB.
Le test de jeu fait tourner Witcher 3 avec les réglages poussés au maximum, mais en Full-HD. La carté étant overclockée d’usine, la fréquence GPU se maintient à 1830 MHz pour une consommation totale de 175 W. Le GPU consomme environ 115 W à lui seul, et ceux-ci s’ajoutent aux 45 W du CPU, lequel grelote à une température package de seulement 42 °C.
En tout, le radiateur doit dissiper environ 160 W, et les autres composants émettent environ une quarantaine de watts supplémentaires, pour un total de 200 W. Pas mal pour un boitier à refroidissement passif ! La construction massive explique les excellentes températures communiquées par les sondes GPU et CPU. Le problème, c’est que dans le même temps, d’autres composants surchauffent dangereusement.
PCB bouillant pour la carte graphique
Nous le répétons une fois de plus : le TDP et le TGP ne sont pas la même chose, et les déperditions de chaleur d’une carte graphique ne sont pas uniquement à chercher du côté du GPU. Pour ceux pas encore entièrement convaincus, voici la photo du PBC de la carte graphique après échauffement avec The Witcher 3. Alors que le GPU barbotte à 60°C, les modules VRM bouillonnent à 121°C ! Inutile de préciser qu’on est largement au-dessus de toutes les limites de températures préconisées et que la durée de vie de la carte dans de telles conditions est particulièrement limitée.
121°C, une claque dans la figure de l’enthousiaste de refroidissement passif. Sauf qu’en vérité, le boitier n’y peut rien. C’est le refroidissement de la carte graphique qui est en cause, n’englobant pas assez de composants. Il faudrait en effet un bloc de refroidissement beaucoup plus large, un peu comme ce qui se fait sur les plaques de refroidissement de watercooling, mais appliqué à un système à refroidissement passif.
Pour limiter les dégâts, nous réduisons le Power Target à 70% et baissons la fréquence mémoire de 400 MHz. La température des VRM baisse alors de 15°C, mais c’est encore beaucoup trop, surtout pour la durabilité sur le long terme du PCB (déformations, séparation des couches qui le constituent). La mémoire est toujours sur le grill avec un 115°C particulièrement préoccupant. Le bridage de la carte n’est donc pas suffisant.
Appliquons maintenant quatre petits radiateurs sur les modules mémoire. Après une heure de jeu, la température des modules reste en dessous des 105°C. La chaleur émise par les VRM se propage en effet aux modules mémoire. De plus, un des modules est recouvert par le cadre de montage, on ne peut donc pas lui appliquer de radiateur. Heureusement, il est situé sous le GPU et est assez éloigné des VRM pour ne pas trop chauffer.
Conclusion, second test à venir
Il nous faut interrompre nos expérimentations, puisque nous tournons un peu en rond. Le problème auquel nous sommes confrontés ne vient pas du boitier en soi, mais des composants choisis et de leur montage. Le Monsterlabo First est un boitier livré sans électronique, c’est à l’acheteur de décider quels composants il va choisir en connaissance des challenges que pose ce boitier. En particulier au niveau de la carte graphique et de son refroidissement.
Dans la seconde partie de cette série, nous allons nous pencher sur de possibles solutions, en particulier un bloc de refroidissement embrassant GPU et VRM, comme c’est le cas des plaques de watercooling. Car en l’état, si le GPU reste au frais, l’autodestruction de la carte est préprogrammée au niveau des VRM. Il nous faut donc trouver un moyen de refroidir cette surface ignorée dans la construction d’origine.
Nous terminons donc cette partie un peu indécis. Certes, la performance de refroidissement du boitier est impressionnante et plus que suffisante pour embarquer des composants haut de gamme. D’un autre côté, nous n’avons pas pu résoudre la problématique de surchauffe des composants non refroidis par les blocs de refroidissement.
Notre expérience nous conseille de nous orienter plutôt vers une GeForce GTX 1660 (Ti), dont les VRM se laissent assez facilement refroidir à l’aide de petits radiateurs collés à leur surface. On devrait ainsi être capable de redescendre en dessous des 100°C. Évidemment, ces radiateurs doivent être adaptés à une solution passive et posséder des ailettes suffisamment hautes. Nous testerons donc dans une deuxième partie ce qu’il est possible de faire avec ce Monsterlabo First, qui tient certainement sa promesse de nous tenir en haleine et de stimuler notre esprit de bricoleur.
le chapitre 5 est intégré au chapitre 4. Le lien du chapitre 5 renvoi au chapitre 6.
Dans ce test, on parle d’un futur 2ème test, est-il toujours d’actualité?