Test : un pad thermique réutilisable au graphite, efficace ?

Image 1 : Test : un pad thermique réutilisable au graphite, efficace ?

Miracle ou illusion ?

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IC Graphite Thermal Pad


Le pad thermique en graphite vendu par Innovation Cooling n’est pas à proprement parlé une nouveauté, puisqu’on utilise ce matériau depuis des années dans l’industrie. Mais jusqu’à présent, il était impossible de se procurer de tels pads en tant que consommateur, à moins d’en acheter un chargement pour tous les PC du quartier.

C’est donc sur ce créneau qu’Innovation Cooling a choisi de se spécialiser en proposant des pads prédécoupés pour un confort d’utilisation amélioré. Le fabricant promet ainsi la fin des problèmes d’application de pâte thermique, qui requiert une certaine dextérité. Mais si ces pads sont indéniablement plus pratiques, sont-ils vraiment à la hauteur en ce qui concerne le refroidissement ? C’est ce que nous allons voir dans ce test.

Le pad de trois centimètres sur trois se négocie actuellement à moins de 9 euros, et celui de quatre sur quatre à moins de 11 €, un prix un peu élevé au regard du matériau employé, que l’on retrouve aussi dans les crayons à papier. Il s’agira donc aussi de savoir si la praticité et la performance de refroidissement des pads justifient ou non le surcout par rapport à de la pâte thermique.

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Structure antibulle ?

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IC Graphite Thermal Pad

Penchons tout d’abord sur ce qui rend ce pad si efficace, du moins en théorie. On sait que le graphène, un matériau très semblable au graphite, possède un coefficient de transmission de la chaleur très élevé en raison de sa structure moléculaire très linéaire. Mais ici, ça n’aurait aucun sens pour un composant censé combler l’espace entre le heatspreader du processeur et le bloc de refroidissement. S’il suffisait de mettre cote à cote deux surfaces planes pour assurer une bonne conductibilité, il faudrait juste visser directement le radiateur sur le processeur.

Les pads sont là au contraire pour se placer dans les plus petits interstices, combler les vides et augmenter la surface de contact, comme on peut le voir à la structure assez granuleuse du pad.

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Et sur un dissipateur poli ?

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IC Graphite Thermal Pad

En observant le pad au microscope, on peut voir les cristaux qui le composent et présentent une structure craquelée. Cela rend le pad relativement flexible et compressible. Ainsi, il peut épouser au mieux les formes du heatspreader dont on voit ici que la surface n’est pas non plus lisse. On évite ainsi les bulles d’air, du moins en théorie.

IC communique un degré de transmission de la chaleur de 35 W/(m*K), ce qui excède et de loin le degré de transmission des pâtes thermiques classiques. Mais comme évoqué plus haut, c’est surtout la capacité à se débarrasser des bulles d’air très isolantes qui compte au final. Sur un refroidisseur à la surface polie, il pas sûr que le pad soit adapté.

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Installation sur 8700K

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IC Graphite Thermal Pad


Je teste tout d’abord le Core i7-8700K avec le plus petit des deux pads, dont les dimensions épousent parfaitement le heatspreader du CPU. Le refroidisseur est un Alseye Windcube LP, un modèle qui n’est pas disponible sous nos contrées. Il ne se distingue pas par sa discrétion, puisqu’on le trouve traditionnellement sur des serveurs où son format low-profile est indispensable.

Mais il a la particularité d’avoir un bloc de refroidissement en cuivre non poli. Enfin, il est particulièrement efficace car la température Tpackage ne dépasse pas les 65°C en test de torture avec Prime 95 (instructions AVX activées) lorsqu’on utilise pour référence la pâte thermique Kryonaut de Thermal Grizzly. Dans ce test de torture, le CPU consomme presque 160 W à lui seul, qu’il faut efficacement évacuer.

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Installation sur 7900X

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IC Graphite Thermal Pad


Je teste aussi le Core i9-7900X, mais cette fois-ci avec un bloc de watercooling Alphacool XPX en conjonction avec le refroidisseur Alphacool Eiszeit 2000 Chiller. Le dégagement de chaleur atteint 245 W, mais le Chiller parvient à maintenir la température à peu près au même niveau que sur le petit processeur, aux environs de 65°C, toujours avec la pâte thermique Kryonaut. On a hâte de voir si ces pads thermiques sont vraiment efficaces.

Image 11 : Test : un pad thermique réutilisable au graphite, efficace ?

Avantages et inconvénients

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IC Graphite Thermal Pad


Les pads fonctionnent tout de suite à pleine mesure de leur performance, il n’y a pas besoin de rodage ou autre. Un autre avantage sur le silicone, c’est la facilité d’utilisation. Pas besoin de se barbouiller les doigts. Enfin, ces pads sont supposés être réutilisables plusieurs fois, ce qui relativise leur coût. Mais est-ce vraiment le cas ?

Sur l’image du dessus, on voit un tube de pâte thermique usagé, et qui illustre bien le fait qu’il est difficile de ne pas s’en mettre partout. Quant aux pads, même après 15 utilisations et environ 50 mesures, ils sont toujours dans un bon état. On voit bien des traces d’utilisation un peu plus sombres, surtout sur les coins, mais elles sont le témoin d’une pression locale importante et pas de traces de doigts malpropres.

Si le matériau devient un peu plus brillant là où il a été particulièrement compressé, la performance de refroidissement n’en est que peu impactée. On mesure une augmentation de seulement trois degrés entre la première et la 15ème mesure sur le pad le plus large. C’est à peine plus que la marge d’erreur, on peut donc envisager sans crainte de réutiliser les pads jusqu’à cinq fois sans baisse de performance.

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Méthode et système de test

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IC Graphite Thermal Pad

Pour bien se rendre compte de la performance des pads par rapport à la concurrence, nous avons effectué nos mesures avec plusieurs pates et pads thermiques classiques. Si la Kryonaut de Thermal Grizzly reste une référence en la matière, nous avons aussi testé l’Arctic MX-2 et la Titan Nano Grease, très abordables, mais un peu trop liquides à notre goût. Nous avons aussi inclus deux pads conducteurs de Gelid et Phobya à base de silicone.

Avant de passer aux choses sérieuses à la page suivante, voici le tableau récapitulatif du système de test et des appareils de mesure utilisés :

Hardware
Socket Intel 2066
Intel Core i9-7900XMSI X299 Gaming Pro Carbon AC4 x 4 Go G.Skill RipJaws IV DDR4-2600
Socket Intel 1151 (Z370)
Intel Core i7-8700K, Core i7-8700MSI Z370 Gaming Pro Carbon AC2 x 8 Go G.Skill TridentZ DDR4-3200@2666 MHz
Windows 10 Pro (Creators Update)
Refroidissement
Alphacool Eiszeit 2000 Chiller
Alphacool Eisblock XPX
Thermal Grizzly Kryonaut (pour changement de refroidissement)
Écran
Eizo EV3237-BK (station de bureautique, travail, HPC)
Mesure de la consommation
Mesure directe de la tension aux entrées d’alimentation
2x Rohde & Schwarz HMO 3054, 500 MHz Oscillographe multicanal à mémoire
2x Rohde & Schwarz HZO50, Pince ampérométrique (1 mA à 30 A, 100 KHz, DC)
2x Rohde & Schwarz HZ355, Sonde (10:1, 500 MHz)
1x Rohde & Schwarz HMC 8012, multimètre à affichage électronique et fonction mémoire
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Test sur dissipateur non poli

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IC Graphite Thermal Pad


Nous commençons nos mesures sur un refroidisseur à la surface non polie. Le pad de graphite s’en sort honorablement, à peu près au même niveau que l’Arctic MX-2, mais reste quand même trois degrés plus chaud que la meilleure des pâtes thermiques. Pour peu qu’on n’envisage pas un overclocking extrême, ces trois degrés sont donc négligeables, et on présume même que la performance pourrait être meilleure sur des CPU AMD, dont la surface du heatspreader est moins lisse que chez Intel. Si on garde à l’esprit la possibilité de réutiliser plus tard le pad, son acquisition peut être vue comme un investissement.

Les valeurs théoriques de transmission de la chaleur sont par contre loin d’être atteintes en pratique. Le pad en silicone de Gelid se pose en sérieux concurrent, même si on peut émettre des réserves sur la longévité du matériau et le risque de dessèchement.

Image 17 : Test : un pad thermique réutilisable au graphite, efficace ?

Test sur waterblock poli

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IC Graphite Thermal Pad

Je vous avais prévenu, sur surface polie, le pad ne fonctionne pas aussi bien, même si ce n’est pas non plus une catastrophe. Le Gelid Pad élimine mieux les bulles d’air à la surface et passe devant le pad en Graphite probablement handicapé par des bulles microscopiques impossibles à chasser de manière manuelle.

Cinq degrés séparent la meilleure pâte thermique du pad en graphite, ce qui rend son utilisation difficilement recommandable, puisqu’il se place aussi derrière les pâtes thermiques d’entrée de gamme. Sur un refroidisseur moins puissant, cette différence de température pourrait bien impliquer un léger throttling (baisse de fréquence) du processeur.

Image 19 : Test : un pad thermique réutilisable au graphite, efficace ?

Conclusion

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IC Graphite Thermal Pad

Après plus de 13 heures de test, c’est le moment du bilan. Avouons-le, nous sommes un peu déçus par la performance du pad de graphite. IC n’a pas su réinventer la physique et ce pad n’est finalement recommandable qu’aux maladroits pressés. Si vous avez par contre un minimum d’attentes de la part de votre refroidissement, vous passerez sûrement votre chemin.

On aime

+ Facile d’utilisation
+ Bien fini
+ Pas de rodage nécessaire
+ Pas de dessèchement, matériau pérenne

On n’aime pas

– Performance moyenne sur surface granuleuse
– Performance médiocre sur surface lisse
– Prix élevé

Même nous trouvons plus d’arguments pour que contre ces pads, leur performance reste assez moyenne et les rend inadaptés sur les systèmes high-end parmi les enthousiastes. C’est un beau joujou durable et qui facilite la vie (ou du moins quelques secondes), mais en ce qui me concerne je reste fidèle à la pâte thermique de bonne qualité, plus efficace et moins chère.